Qu'est-ce que
la pédagogie ?
 
"Vous faites quoi
à la MPM ?"

Décembre 2021

 

À la Maison de la Pédagogie de Mulhouse,

pas de rencontre à l’affiche de décembre,

mais des interrogations sur les effets persistants de la pandémie

 

 

 Avons-nous été imprudents, présomptueux, ou simplement avons-nous été trop optimistes en annonçant fièrement en tête du Billet de novembre que la MPM allait renouer avec les rencontres en présentiel ? Ou bien, tout simplement, après un an et demi de privations, avons-nous pris nos désirs pour des réalités ?

 

La rencontre du 15 novembre avec le « grand pédagogue » Jean-Marc Gaspard Itard (1774-1838) : en présentiel ou à distance ?

Elle a été proposée dans les deux versions. Cela permettait aux quelques personnes très éloignées de Mulhouse de continuer à participer à nos rencontres, et aux autres, de se retrouver autour d’une grande table, de papoter avant, après – et parfois pendant – la séance… Jusqu’au dernier moment, le match fut serré entre les partisans du distanciel et ceux de la présence physique. Finalement, il est apparu plus simple d’en rester à la visio.

Comme le montre la trace, les échanges furent riches et soutenus autour de celui que l’on peut considérer comme le double « inventeur » du postulat d’éducabilité et de l’éducation spécialisée. Avec de salutaires interrogations sur la double nature du volontarisme pédagogique : comment concilier visée éducative de l’adulte et respect de l’enfant dans sa singularité ? On retrouve là la tension entre désir individuel et norme sociale qui constitue, pour Bernard Charlot, le fondement anthropologique de l’éducation. Une tension d’autant plus d’actualité que la pandémie amène nos sociétés à reconsidérer les valeurs censées définir la norme…

 

La rencontre-débat du 30 novembre sur « Faire débattre les élèves » : en présentiel, à maintenir ou annuler ?

L’aiguille du compteur des inscriptions n’a pas vraiment décollé. Il a fallu annuler la rencontre, faute d’un nombre suffisant d’inscrits. Une « première » dont la MPM se serait bien passée ! De report en report pour cause de covid, cela faisait un an et demi que nous guet­tions le moment favorable pour vivre cette thématique en présentiel. Car, en accord avec Jean-Luc Denny, notre intervenant, il n’était pas envisageable d’organiser une rencontre sur le débat par écrans interposés. Et puis le sujet nous paraissait tellement d’actualité, dans l’école et hors l’école. Aujourd’hui, le débat est partout. Mais s’il est bien la forme la plus élémentaire et la plus élevée de la vie démocratique, sa mise en œuvre ne va pas de soi et ne se limite pas aux séances d’éducation morale et civique.

Alors, à la MPM, nous essayons de comprendre pourquoi cette rencontre-débat a recueilli aussi peu d’inscriptions. Mauvaise diffusion de l’information de notre part, dans nos réseaux et au travers de ceux de nos partenaires ? On a aussi évoqué le manque de disponibilité des enseignants pour cause de conseils de classe. Mais, aujourd’hui, dans un nombre croissant d’établissements, ces instances se réunissent à la fin du premier semestre et non plus avant les vacances de Noël…

Il nous faut alors, une fois de plus, prendre en compte les effets de plus en plus prégnants de la pandémie, dans ses différentes dimensions. D’abord la fatigue accumulée depuis un an et demi par les conditions de travail pour adapter sans cesse les modalités d’accueil des élèves afin de maintenir une continuité, sinon pédagogique, du moins éducative. Dans un tel con­texte, surtout à l’approche de l’hiver, on peut comprendre qu’il soit difficile de se mettre en route pour aller rejoindre le lieu de la rencontre. D’autant plus que le confinement a installé la pratique de la visio, moins coûteuse en temps et en énergie que la soirée en dehors de son domicile. Une donnée qui vaut pour les deux rencontres inscrites à notre calendrier de novembre. La pandémie a sans doute créé de l’irréversible dans les relations humaines, et il va falloir s’y habituer à la MPM aussi, dans un monde qui n’est plus celui « d’avant », et dans lequel Edgar Morin nous dit, dans un entretien paru dans le numéro de décembre de la re­vue Sciences Humaines : « Nous allons devoir apprendre à naviguer dans un océan d’incerti­tudes ».

Mais, pour l’instant, pour Jean-Luc Denny et pour la MPM, la rencontre sur la pratique du débat à l’école… et ailleurs, aura bien lieu, étant donné l’importance du sujet dans l’éducation du citoyen. Nous espérons bien sûr que ce sera en présentiel, plutôt au début du printemps 2022…

 

Pandémie et éducation : adaptations circonstancielles ou basculements de fond ?

La MPM continue à « naviguer » à la recherche d’autres sujets de réflexion, d’autres interro­gations pour prendre en compte les remous provoqués par l’épreuve de la pandémie et pro­poser des pistes pour la pédagogie, l’école, l’éducation de demain ou d’après-demain. C’est ainsi que nous nous sommes tournés vers un récent ouvrage « L’École à l’épreuve des incerti­tudes ; Plaidoyer pour une institution émancipatrice ». L’auteur, Aziz Jellab, depuis peu Direc­teur scientifique de l’AFAE (Association française des acteurs de l’éducation, qui édite la revue Administration et Éducation) prend appui sur la façon dont la pandémie a, plus clairement que jamais, mis à jour les failles du système scolaire, et développe une approche glo­bale de l’éducation qui doit essayer d’articuler l’expérience et les apprentissages dans et hors l’école.

La déstabilisation du système éducatif provoquée par la pandémie invite à regarder diffé­remment son fonctionnement et à remettre en cause certaines formules qui, à la longue, sont devenues des « allant de soi ». Ainsi en va-t-il, depuis la loi d’orientation de 1989, de « l’élève acteur de ses apprentissages » et de « l’élève au centre du système éducatif ». Dans l’Expresso du Café pédagogique du 24 novembre, Aziz Jellab invite à déployer « un fil rouge sur ce que l’expérience des élèves nous enseigne quant au fonctionnement du système édu­catif et aux défis à relever » :

« Au lieu de parler des élèves, ne serait-il pas plus judicieux de leur donner la parole, de les en­tendre et de les écouter ? C’est à cette condition que l’on peut mieux saisir leur expérience, ce qu’ils pensent, ce qu’ils vivent, leurs aspirations, leurs épreuves... Écouter les élèves, c’est aussi s’intéresser à leurs sphères de vie qui ont pu, par nécessité, être mieux regardées durant le confi­nement où les professionnels de l’école ont pu se rendre compte, de manière concrète, de l’épais­seur des inégalités et de la distance entre leurs représentations et les conditions de vie des jeunes. C’est enfin réaliser que les élèves appartiennent à des univers sociaux et culturels qui sont partie-prenante de leur rapport à l’école, au savoir, au monde et à l’avenir.

Partir des publics scolaires pour penser et agir dans l’école d’aujourd’hui, c’est aborder sous un autre angle les mutations que celle-ci connait, dans un contexte marqué par la crise qui dépasse le seul périmètre de la santé. Le pari à relever sera de voir comment, tout en prenant appui sur l’expérience des élèves, leurs besoins mais aussi et dans nombre de cas, leurs fragilités, l’institu­tion scolaire est capable de se réinterroger et d’assurer une émancipation intellectuelle par des savoirs dialoguant avec la vie. »

 

De belles rencontres en perspective pour le début de l’année 2022

Aziz Jellab a répondu favorablement à notre invitation : il interviendra à Mulhouse le jeudi 24 février, en présentiel, si les conditions sanitaires le permettent.

D’autres rencontres sont d’ores et déjà à noter pour le début de l’année prochaine pour continuer à interroger ensemble, en présentiel ou à distance, la complexité de la pédagogie et de l’éducation :

  • le 10 janvier, nous irons à la rencontre du grand pédagogue, Joseph Jacotot (1770-1840), avec cette question suggérée par Philippe Meirieu : « Peut-on enseigner sans savoir ? »
  • toute la semaine du 31 janvier au 5 février, la MPM sera partie prenante du Festival « Enfance et Nature», axé cette année sur la question des risques dans les pratiques d’éducation dans la nature.

À noter aussi, le 19 janvier, l’Assemblée générale de l’association, à laquelle sont conviés, aux côtés des adhérents, celles et ceux qui ont la certitude que la MPM a toute sa raison d’être dans le paysage éducatif mulhousien… qui partagent avec nous ce propos formulé par Edgar Morin dans le numéro de Sciences Humaines cité plus haut : « À la doctrine qui a réponse à tout, je préfère la complexité qui pose question à tout ».

Cela faisait près d’un an que la Maison de la Pédagogie de Mulhouse n’avait plus organisé de rencontres en présentiel…

Grâce aux visioconférences, elle a certes réussi à maintenir tout au long de l’année 2020-2021, son programme de rencontres, avec des taux de participation tout à fait respectables. Seule la manifestation Anniversaires 2021, initialement prévue au printemps a dû être repoussée à l’automne afin de pouvoir se tenir en présentiel, et renouer ainsi avec la spontanéité, la chaleur, la richesse des échanges entre participants.

 

Pour contacter la MPM…  Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

 

 

 

 

 Nos partenaires, nos soutiens