Billet MPM - Avril 2022

 

Trois enjeux éducatifs forts (parmi d'autres) pour la Maison de la Pédagogie


 

 

Qu'est-ce que
la pédagogie ?
 
"Vous faites quoi
à la MPM ?"
 

La MPM a fêté son 5e anniversaire et les 100 ans de l’Éducation nouvelle

Trace de la journée du 09 octobre 2021PDF.png

La MPM n’est pas seule à être préoccupée par le devenir de notre système éducatif à l’issue des élections de ce printemps 2022… Nous ne pouvons pas rester insensibles aux risques annoncés de dégradation généralisée d’un service public d’éducation déjà fort malmené ces derniers temps. Mais, au-delà de ces légitimes inquiétudes et de la morosité ambiante, la MPM continue à ouvrir, entre interrogations et certitudes, le champ des possibles pédagogiques, scolaires et, plus largement, éducatifs. Non par fanfaronnade ou optimisme béat, mais par nécessité vitale pour celles et ceux qui pensent que l’éducation est un enjeu trop important pour être laissé aux mains des seuls décideurs politiques.

Une seule rencontre ce mois-ci au programme de la MPM : celle du lundi 4 avril avec le philosophe Alain, dans le cadre des Rencontres avec les grands pédagogues. Ce qui nous laisse de la place pour présenter les trois enjeux dont il est question dans le titre de ce billet.

 

La place du débat à l’école dans l’éducation à la citoyenneté

C’était le fil conducteur du débat-rencontre du 22 mars dernier qui s’est déroulé à la fois en présentiel et à distance. La séance a précisément commencé par un débat réunissant une journaliste, un chef d’établissement à la retraite, une professeure de lettres en lycée et un élève membre du CVL (Comité de la vie lycéenne) de son établissement. Les échanges ont été animés par Nicole Poteaux, (membre du Comité d’animation de la MPM), à partir de la question : « L’école produit-elle des citoyens » ? Le but de ce débat introductif n’était pas d’aller au bout d’un sujet aussi vaste, mais de permettre à Jean-Luc Denny, maître de conférences en Sciences de l’éducation et de la formation à l’université de Strasbourg, d’inviter à réfléchir, par touches successives, sur la conduite d’un débat.

Jean-Luc Denny a ensuite fait part de son travail de recherche sur la transmission des valeurs de la République à l’école. Une transmission qui ne peut s’effectuer selon le modèle dominant d’enseignement, du maître vers l’élève, sous peine d’aboutir à des effets contre-productifs. S’appuyant sur les travaux du pédagogue Paulo Freire, il a montré comment l’éducation à la citoyenneté suppose de prendre au sérieux la parole de l’élève pour partir de son expérience, de son milieu de vie et des valeurs qui sont les siennes. C’est à cette condition que l’éducation à la citoyenneté peut prendre sa dimension émancipatrice.

Animer un débat dans une perspective d’éducation à la citoyenneté c’est donc, pour l’enseignant, opérer un changement de posture qui va bien au-delà du recours à des pratiques formelles de distribution de la parole et de régulation des échanges entre les intervenants. Cette rencontre ouvre donc sur une redéfinition de la professionnalité enseignante et appelle d’autres moments d’échanges…

 

Ce que l’école doit enseigner aux élèves

Les programmes des différentes disciplines scolaires sont régulièrement les objets de remaniements qui restent assez souvent superficiels. C’est un tout autre chantier qui est le sujet de la Lettre ouverte que le CICUR (Collectif d’interpellation du curriculum) propose d’adresser aux candidats des deux vagues d’élections de ce printemps 2022.

Le Collectif, créé en 2020, commence par dénoncer le caractère socialement sélectif des savoirs actuellement enseignés dans notre système scolaire.

« L’École française n’est pas une école de la promotion de tous par le savoir. Elle est une « école des inégalités et de la sélection sociale, faute d’avoir vraiment pensé les savoirs qu’elle enseigne et la manière de les enseigner. À chaque étape de l’élargissement de l’accès aux études secondaires et supérieures, le rendez-vous d’une réévaluation et d’une réorganisation des contenus enseignés a été manqué. (…) Elle est restée sur une logique de sélection par la nature même des savoirs enseignés plutôt que de rechercher ce dont tous les élèves ont besoin. Elle propose aux élèves des savoirs parcellaires, qui laissent souvent de côté des pans essentiels de ce qui nourrit l’éducation : ouverture sur d’autres cultures, savoirs juridiques, relations des hommes avec le vivant, organisation des sociétés, compétences de vie personnelle et sociale, etc. ».

Après ce réquisitoire sans concession, le Collectif pose la question des nouveaux défis auxquels l’école est aujourd’hui confrontée :

« Notre École est aujourd’hui au pied du mur. Confrontée aux défis culturels, climatiques, éthiques, scientifiques du 21e siècle, elle est sommée quotidiennement de répondre à tous les grands problèmes de nos sociétés en pleine mutation sans que personne ne s’interroge sur ce qui doit et peut vraiment relever du scolaire. L’École n’est plus le « sanctuaire » qu’elle a été pour des élèves triés sur le volet et c’est tant mieux. Elle doit en effet accueillir des enfants et des jeunes issus de tous les milieux, dont certains, très pauvres et vivant dans des conditions très difficiles, importent à l’École une bonne partie de leurs problèmes ; la révolution numérique produit des effets considérables sur les enfants et les jeunes à l’École, dans la cité et dans la cellule familiale… Les familles pour leur part ont évolué dans leur composition, dans la prise en charge de l’éducation. La flexibilité accrue du travail est souvent incompatible avec l’accompagnement scolaire auquel elles sont appelées. Le système scolaire, comme les familles sont confrontés à de nouveaux défis éducatifs dont il n’est tenu aucun compte, ni dans le dialogue École/familles ni dans la définition des missions de l’École et des contenus de savoirs, de capacités et de compétences. »

C’est pourquoi le CICUR souhaite porter sur la place publique le débat sur les savoirs scolaires, le sens qu’ils ont pour les jeunes d’aujourd’hui et la place qu’ils doivent prendre dans une éducation visant à comprendre et agir dans un monde en profonde mutation. La Maison de la Pédagogie de Mulhouse  a fait le choix d’apporter sa contribution à cette réflexion sur le curriculum qui ouvre sur ce que les auteurs de la Lettre ouverte appellent un nouvel « imaginaire éducatif ».

 

 

La place de l’école dans le vaste champ de l’éducation 

« On a trop souvent tendance à confondre école et éducation. L’école est essentielle, c’est le lieu où on apprend des choses fondamentales, mais l’éducation ne se résume pas à l’école. Un proverbe africain dit qu’il faut tout un village pour élever un enfant. Il faut donc en plus des enseignants des parents, des collectifs de quartier, des structures de jeu, des médias... L’école ne peut pas tout faire ».

Ce sont les propos que Philippe Meirieu a tenus avant sa participation aux Rencontres nationales de l'éducation populaire qui ont eu lieu du 17 au 19 mars à Poitiers. On ne peut imaginer meilleure validation de la pertinence du « quart-lieu apprenant » en construction à Bourtzwiller, dont la MPM est partie prenante Il suffirait juste d’adapter le dicton africain cité par P. Meirieu et dire : « Aujourd’hui, il faut tout un quartier pour éduquer un enfant ».

Cette affirmation ne signifie nullement un affaiblissement du rôle et de la place de l’école qui reste « essentielle » (comme le souligne Philippe Meirieu) dans la cité et dans l’éducation de ses jeunes habitants. En même temps qu’elle est une invitation à reconnaitre que, aujourd’hui encore moins qu’avant, « l’école ne peut pas tout faire », elle invite l’institution scolaire à redéfinir ce qu’elle a à faire de mieux pour remplir sa mission au service du public le plus large et le plus diversifié dans le champ de l’éducation.

Par ses activités propres ou au travers des partenariats avec des structures locales ou nationales, la Maison de la Pédagogie de Mulhouse s’attache à montrer sans relâche comment des pratiques pédagogiques, d’autres modes d’organisation des apprentissages, d’autres approche des savoirs scolaires, constituent autant de possibles pour l’école et l’éducation en réponse aux défis à relever.  Aujourd’hui plus que jamais sans doute depuis sa création, la MPM est là pour affirmer que la pédagogie est un va-et-vient permanent entre rêve et réalité, entre l’activité des chercheurs et celle des praticiens dans tous les domaines de l’éducation.

 

 

À lire ...

  • la « trace » de la Rencontre du 28 janvier avec le « grand pédagogue » Georg Kerchensteiner  

 

 

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